Compagnie Asphalte


S’enfouir – pop-fiction

C’est le récit musical du trou noir de la galaxie. Inquiétant, inconnu, ténébreux...

Dès l’entrée dans la salle du théâtre, on ressent une ambiance particulière tout d’abord par la scénographie, feuillue comme une forêt, herbes hautes, talus, le long d’une route infinie.

Dès que les lumières s’éteignent dans la salle, sur scène on entend et on voit à jardin, un musicien, sa musique d’une guitare électrique, rauque, sons qui souffrent et sons qui pleurent, sons créés, sons connus, chansons, poèmes …

Une femme parle, danse, ce sont ses cheveux qui dansent et emplissent la scène, puis sa voix, posée : elle joue sur les mots, s’enfouir, s’enfuir il n‘y a qu‘un pas, non une petite lettre en plus ou en moins dans ce monde de la nuit où la danse exprime la détresse, le mal-être, le mal-vivre…
Une femme s’en va, rejoint une autre femme dans une boîte de nuit. Puis elle s ‘en va encore. S’enfuir.
La femme s’enfouit dans les herbes, s’y love, dans les bois, s’enfuit, des souvenirs la happent, tout y passe depuis qu’elle a sept ans, allitération de mots en f, elle s’enfonce dans le bois dense et feuillu aux bras tentaculaires, elle sourit, jusqu’à l‘adolescence, après elle ne sourit plus, après c’est la douleur : « s‘enfuir, dit-elle ! », passage de route, la nuit surtout, la peau respire la mer, la peau respire la danse, et la musique erre, appuie là où ça fait mal,  extirpe le cœur dans la nuit noire comme les chamanes, des animaux de la  nuit sur le bas-côté, témoins ébahis eux aussi de l’errance …
Fiction dans l‘auto, fiction en auto… une route, la route aux mille taches, aux mille effets, successions de voiles qui se déchirent. Ce voyage scolaire en Italie, à 15 ans, tu te souviens ? 
« Le désir est un miroir », le désir fonctionne, le désir avance et moi j‘avance dans une forêt aveugle... « Le désir est une épiphanie … » aimer une femme, « entre la route et la lande je l‘embrasse … » elle rit un peu gênée, un peu boostée …. Qui suis-je ? Je suis la terre brûlée, je suis la Kahina la combattante, j’avance droite face aux regards sales…
La femme se lance dans une danse folle avec ses cheveux épars qui dansent aussi … elle a besoin de libérer les forces nocives, les regards nocifs qui la jugent… qui l‘éloignent de son amour…
Aline César a écrit et mis en scène son texte en créant d’abord une atmosphère onirique entre chien et loup, entre rêve et réalité. Elle nous a embarqué, on s’est laissé faire. C’est un spectacle qui pourrait se jouer sans fin véritable, un « road trip » urbain, le temps d’une nuit interminable, elle a créé un nouveau style, une nouvelle forme inconnue et sublime une « pop fiction », inspirée du cinéma peut-être, de la musique telle un personnage à part entière qui donne sa partition au texte, écrit au millimètre, en filigrane, en ellipse parfois.
Et puis des références, Marguerite Duras, en cadeau la voix de Marguerite Yourcenar et d’autres encore.
C’est le récit musical du trou noir de la galaxie. Inquiétant, inconnu, ténébreux...Celui d’un coming-out.
Grand vertige, grande efficacité. Grand silence long à la fin de la représentation, c’est tout dire.


Le Club de Mediapart / Djalila Dechache /  9 juin 2022


Se regarder dans le rétro

« Elle dit “s’enfuir”, j’entends “s’enfouir”. » « Elle », c’est la femme désirée par la narratrice, incarnée par Véronique Sacri, sur la piste de danse d’une boîte de nuit, un soir de rupture amoureuse. Tout est dans cette lettre en trop, ce mot pris pour un autre.

Un lapsus qui justifie autant qu’il motive ce road-trip, écrit et mis en scène par Aline César, sur les routes de la mémoire, en direction de cette femme qu’il s’agit de retrouver. Une paronomase qui dessine d’emblée un double mouvement, autour duquel s’articule ingénieusement la pièce, tant à l’échelle dramatique que scénique, entre lignes de fuite en avant et creusements en spirale. Déterrer pour avancer, avancer en déterrant, pour que ressurgisse un coming out raté, donc silencié, à l’adolescence. Un écart, un décalage de compréhension, que matérialiserait cet espace mental construit entre forêt hyperréaliste et un pan de papier vertical, comme une ouverture vers un ailleurs, sur lequel sont projetées en boucle des images fantasmées de forêts, de lacs et de routes, véritables Mulholland Drive obsessionnelles. 
Ce serait précisément dans cette légère inadéquation des paysages intérieurs, entre réalisme et onirisme, que peut s’ouvrir la possibilité d’un récit. Façonné sur les trois strates du présent adulte, de l’enfance et de l’adolescence, celui-ci semble régi par le principe de l’après-coup. Autrement dit, par un mouvement rétrospectif, un événement dans le présent – ici, la rencontre avec cette femme dans une boîte de nuit – fait signe vers un événement passé, à la fois même et autre, souvent traumatique, jusqu’alors enfoui, qui parvient ainsi à la conscience et trouve un sens – ici, le désir éprouvé pour une camarade à l’adolescence, et un coming-out volé par les autres, épisode trop violent pour ne pas être refoulé. 
L’habileté de la construction dramaturgique est d’ajouter à cette dialectique une troisième strate temporelle, celle de l’enfance, où se logent les premiers fantasmes et les prémices d’une identité à venir. Cette période originelle se fait alors réceptacle merveilleux – au sens littéraire du terme –, à partir duquel le présent en train de se vivre s’éprouve et s’ancre, et, par ricochets, le passé adolescent douloureux se ré-éprouve, s’ancre, et ainsi se sublime. 
S’élabore donc un récit elliptique, tortueux, dans un passé-présent roulant à tombeaux ouverts, qui nous prend et nous emporte dès la première phrase. Au cours de cette errance rimbaldienne où le Je se découvre Autre, les décrochages temporels s’opèrent notamment par le truchement du motif mythologique du faune. S’il peut certes s’apparenter à une figure plutôt convenue de la métamorphose, de l’androgyne, il se fait ici le subtil point de superposition et de diffraction des strates narratives, comme un des leviers actionnant ce geste d’enfouissement-désenfouissement. Le faune est en effet à la fois la femme désirée au présent, et la projection fictionnelle de soi dans l’enfance, pour, finalement, coïncider parfaitement avec l’adolescente blessée. 
Quant à la théâtralisation du texte, dont la forme ne se prêterait pourtant pas de prime abord à la scène, elle s’effectue par un travail sur la voix, qui offre des variations de tessitures, de reliefs et de points de vue. Comme autant d’entrées dramaturgiques, de focales, par lesquelles dire autrement la même chose, alternent ainsi la voix en scène, intimiste, voire sensuelle, adressée au public ou à un dictaphone, et celle hors-scène, qui dézoome le récit pour mieux le préciser. Surtout, cette partition textuelle s’accorde avec la musique, jouée en live par Yan Péchin, dans l’arrière-scène inconsciente de la narratrice. Des rengaines entraînantes, tour à tour dark pop et rock ambient-électro, se font ainsi l’écho autant que le support tangible de ce minutieux et très littéraire texte-patchwork, « pop-fiction » truffée d’extraits de chansons et de références musicales, s’enroulant autour d’anaphores et de comparaisons et progressant par allitérations et assonances.
Et l’œuvre, comme souvent dans les récits de l’après-coup, finit par se mettre en abyme, s’observer en train de se faire, en ne cessant jamais d’interroger son sens et sa pertinence. Lors d’un passage explicitement méta, dont on peut regretter la teneur trop explicative, en rupture avec la bal(l)ade qu’est l’ensemble, on entend notamment la voix de Yourcenar… Mais on pense aussi aux mots de Duras, dans cette idée manifestée que l’enfance contenait en son sein la vie, et le texte, futurs. Tout était déjà là, en latence d’être vécu, d’être couché sur papier, dans « la forêt de l’écrit à venir ». La forêt, encore. 

I/O Gazette / Hanna Laborde /  20 juillet 2023

 

« S'enfouir - pop fiction », road-trip intime et haletant !

S’enfouir ou s’enfuir ? Probablement un peu des deux. S’enfouir dans les souvenirs adolescents des premières découvertes amoureuses, s’enfuir dans le présent vers celle aimée maintenant. S’enfouir pour mieux renaître, s’enfuir pour se redécouvrir : la narratrice de ce coming-out aux accents de fable entremêle les temporalités pour explorer son identité. Dans une scénographie mystérieuse, reflet végétal de l’âme humaine, et accompagnée par une musique live qui prolonge sensoriellement cette ambiance, la voilà embarquée dans un road-trip nocturne et intérieur, une introspection en mouvement qui se nourrit de références pop et littéraires. Le texte, beau et puissant, devient un véhicule métaphorique qui nous transporte sur les routes de ce voyage intime, à la recherche de ce qu’il y a de plus enfoui en nous.

La Provence /  Vaucluse /  16 juillet 2023

 

Aline César : “La pop-fiction s’inscrit vraiment à la jonction entre l’intime et le collectif”

Autrice, metteuse en scène, historienne de formation et chargée de cours à l’Institut d’Etudes Théâtrales de Paris III – Sorbonne Nouvelle et spécialiste de la dramaturge britannique du 17e siècle Aphra Behn, Aline César propose avec sa compagnie Asphalte au Off d’Avignon au 11. jusqu’au 26 juillet une version sourde et profonde de son texte S’enfouir (Lansman). Elle répond à nos questions sur ce texte intime qui prend vie sur scène.

Pourquoi et comment avez-vous eu envie de mettre un texte aussi intime en scène ?

Pour moi le spectacle commence d’abord par un geste d’écriture, c’est toujours l’écriture qui est le moteur premier du projet. Ici le moteur a d’abord été une commande des éditions Koïnè qui m’ont demandé d’écrire un monologue sur l’enfance, et de l’enfance, j’ai tiré un fil vers l’adolescence, puis vers l’âge adulte.
Je suis partie de ce moment frontière entre l’enfance et l’adolescence, ce moment charnière de la découverte de l’amour. C’est vraiment au fil de l’écriture que je me suis aperçue que j’avais envie de parler du coming out. Donc c’est par l’écriture qu’est né le projet de porter ce récit à la scène.
S’enfouir est un récit singulier. Ça parle de métamorphose, ça parle de comment on se découvre être autre chose que ce qu’on est ou que ce qu’on croyait être, de comment on assume ou pas cette découverte, qu’est-ce qu’on en fait, comment prendre d’autres routes, des routes inédites, inexplorées, comment devenir ce que l’on est. Et je pense que c’est très universel. Ce récit, même s’il est très situé, très intime, j’ai la conviction qu’il peut toucher plein de personnes. Je crois que la question qui est posée est vraiment celle du voyage initiatique. Alors ça prend la forme d’un road-movie. Pour rire je dis dans le texte que c’est « une fiction dans l’auto » et non pas « une auto-fiction ». Au cours de ce voyage initiatique, au fond, ce personnage de femme va se découvrir elle-même, mais surtout aller au bout de son désir. C’est beaucoup une histoire de désir, qui est le moteur premier de la plupart de nos histoires, que ce soit dans la littérature, au théâtre ou au cinéma.

L’écriture est très contemporaine et aussi très référentielle, comment cela crée-t-il des ponts – ou pas- avec le public d’Avignon ?

Pour porter ce récit à la fois très intime et très universel, j’ai en toute modestie (rire) inventé un nouveau genre littéraire : la « pop-fiction ». Un terme forgé sur le modèle de la science-fiction, donc une fiction qui s’articule avec la référence à la pop culture, aux cultures populaires et notamment à la chanson pop pour laquelle j’ai une grande passion. La chanson pop est exactement à la jonction entre ce qu’il y a de plus intime, de plus personnel – on a tous en tête une chanson qui nous rappelle un évènement important, triste, joyeux ou bouleversant de notre vie – et en même temps la chanson est ce qu’il y a de plus partageable et de plus collectif. La chanson voyage et permet aussi de se réunir, comme le théâtre, c’est un espace collectif, un espace de communion où peuvent se dire des récits singuliers. La « pop-fiction », pour moi, c’est une forme qui fait fortement appel à la musique, dans les références, mais aussi dans la musicalité de la langue. J’ai une langue très volontairement ciselée, poétique et musicale, très proche de la poésie, qui est ma première maison d’écriture.
Le texte est aussi tissé de multiples références. A l’adolescence, la narratrice cherche des modèles, des figures tutélaires, d’artistes, comme Rimbaud, Kurt Cobain ou Camille Claudel, mais aussi des figures de femmes lesbiennes. Et là, c’est le vide sidéral. J’ai grandi à une époque où il n’y avait ni Angèle ni internet, donc mes modèles à moi, mes icônes pop, me parvenaient beaucoup par la radio et les livres. On entend à un moment une rediffusion de Marguerite Yourcenar dans une Radioscopie, où elle évoque sa compagne, fait rarissime. Le texte parle aussi de cette absence de représentations.
J’ai la conviction que la « pop-fiction » s’inscrit vraiment à cette jonction entre l’intime et le collectif, je suis persuadée qu’à travers cette forme de récit, on peut embarquer beaucoup de monde.

Quel est le rapport à la terre et comment cela imprègne-t-il la mise en scène ?

Dans le récit de ce coming-out sur le mode du road-trip, le personnage de la femme quitte son foyer et au fil de la route, elle se reconnecte à son enfance et à son adolescence. Le désir pour une femme la ramène d’abord à ce premier moment trouble, entre la fin de l’enfance et le début de l’adolescence, moment où tout est encore indéfini, ouvert, possible. Il y a une grande liberté dans l’enfance. On passe d’un rôle, d’un genre à un autre sans se poser de questions et c’est aussi un moment où elle est très connectée est très relié à la nature. Le personnage entretient un rapport très fort à la nature, à la forêt, au jardin, aux arbres, à la terre. Elle se remémore cette idée de s’enfouir dans la terre, comme quand on est enfant et qu’on s’amuse à s’enfouir dans le sable. Elle est dans un rapport très sensuel et très instinctif à l’environnement. Cette liberté et ce rapport à la nature de l’enfance la renvoie à une figure de faune, un personnage fantasmagorique qui accompagne la narratrice, et qui est comme une sorte de double imaginaire, de compagnon de jeu de l’enfance, et évidemment ce double est plutôt masculin.
Cette figure du faune d’un seul coup se télescope à son présent de femme, lorsque son désir pour une autre femme ressurgit, et que l’enfance et l’âge adulte se télescopent.
Quand j’ai réfléchi à la scénographie que je désirais pour ce spectacle, je me suis dit qu’il fallait absolument quelque chose d’immersif, une scénographie dans laquelle le public aurait envie de s’enfouir. Non pas un univers figuratif mais plutôt l’espace mental de la narratrice. Et donc je me suis dit qu’il fallait du végétal, qu’il fallait construire un univers faussement naturel, et j’ai naturellement pensé au plasticien Johnny Lebigot. C’est un artiste qui travaille beaucoup sur le mélange des trois règnes, le végétal, le minéral, l’animal, et qui fabrique à partir des résidus de ces trois règnes des chimères, par exemple des arbres qui ont l’air naturels mais qui ont des formes un peu étranges, et qui en fait sont constitués d’une multitude d’essences. Johnny Lebigot a proposé un espace pour ce récit qui tient à la fois de la forêt, du bayou et du voyage.

Comment correspondent le lien entre le temps et l’espace : entre la femme, l’adolescente et les deux voyages ?

Effectivement, ce récit est à la fois un voyage dans l’espace, un road-movie, mais aussi un voyage dans le temps, un voyage au cours duquel des souvenirs enfouis refont surface. Trois temporalités cheminent en parallèle, se répondent et se superposent. Il y a d’abord le récit de cette femme à l’âge adulte qui va oser vivre ce que peut-être elle s’était empêchée de vivre jusque-là, son désir pour une femme. Il y a le récit de l’enfance qui revient, par petites touches, et puis enfin il y a l’adolescente. Un autre voyage lui revient à l’esprit, un voyage scolaire en Italie, l’année de ses 15 ans, où un premier coming-out s’est mal passé et où sa vie a failli basculer. C’est ce moment, ce point de rupture qui lui revient à la mémoire au fur et à mesure de la route.
Pour raconter cette histoire de l’adolescence en particulier, j’ai utilisé une autre voix, une voix à la troisième personne du singulier lorsqu’elle parle dans un dictaphone sur lequel elle enregistre un texte, qu’elle écrit au départ pour se tenir éveillée. Puis on comprend qu’à travers ce récit dans le dictaphone, elle recolle les morceaux épars du puzzle de son adolescence. Elle ne dit plus « je » mais « elle », comme si c’était difficile de dire « je », pour raconter cette partie-là de l’histoire qui est sans doute la plus secrète et la plus brûlante.
Ce qui m’est apparu en écrivant cette histoire, c’est à quel point l’enfance, l’adolescence, l’âge adulte ne sont jamais réellement séparés et qu’on chemine toujours avec l’enfant et l’adolescent en soi. Dans S’enfouir l’adulte vient consoler, voire réparer quelque chose qui n’a pas pu se vivre de façon heureuse à l’adolescence. C’est comme si la femme adulte retrouvait l’adolescente blessée sur le bord de la route et lui disait « allez ça va bien se passer, il faut juste laisser passer un peu de temps ». Et puis elle retrouve le tapuscrit d’un roman qu’elle a écrit quand elle est adolescente, et elle réalise à quel point dans ce roman y avait déjà comme des clés, des clés secrètes qu’elle aurait adressées à son moi du futur. Dans cette espèce de convergence des temps, elle s’aperçoit alors que tout était déjà là, en germe, prêt à éclore et que c’est bien des années plus tard qu’elle peut s’en emparer, qu’elle peut enfin se réunir avec elle-même.

Comment la musique et l’interprétation live de Yan Péchin fonctionne-t-elle avec le spectacle et quel rôle joue-t-elle dans la réminiscence ?

La musique est très importante dans le texte lui-même et donc dans le spectacle, d’abord par les nombreuses références aux chansons pop, de Chris Isaak à David Bowie, en passant par Lou Reed, Jimmy Summerville ou Nirvana, portées par par le musicien au plateau Yan Péchin, qui est un grand guitariste et un grand compositeur, qui a accompagné Alain Bashung, Rachid Taha, Hubert-Félix Thiéfaine, Jane Birkin, Brigitte Fontaine, et bien d’autres. Ces chansons sont évoquées, retraversées et effectivement elles jouent un rôle de réminiscence, un rôle de réactivation du souvenir. La chanson a cette capacité de cristallisation de moments importants de la vie. La « pop-fiction » évidemment appelle la présence de la chanson, qui devient un endroit de partage et crée des connivences invisibles entre le plateau et le public.
La musique devient comme le prolongement de la pensée du personnage, de ses émotions, et c’est ce qui va aussi nous emmener dans une dimension très road-movie, avec des accents tantôt rock, tantôt minimalistes, dans une pop dark urbaine et sensuelle, avec des textures que créé en permanence Yan Péchin, qui chaque jour improvise une partie de sa partition. Cela confère au spectacle une dimension de l’ordre de la performance qui s’accorde très bien avec la comédienne Véronique Sacri, une interprète très intense et instinctive qui traverse aussi ce récit, ce road-trip comme une performance.
Cult.News / Yaël Hirsch / 19 juillet 2023

Simonetta – promenade pop

Caterina Barone raconte la vie de Simonetta Vespucci, muse de Sandro Botticell dont tout le monde connaît le visage, mais pas forcément l’histoire…

Depuis maintenant dix ans, le « IF » propose des soirées conçues comme des parenthèses dans l’effervescence avignonnaise. Ce Festival parallèle invite ainsi des artistes à présenter leur travail devant un public principalement composé de professionnels, dans des jardins privés que des particuliers mettent gracieusement à disposition du IF. Un moment spécial de rencontre et de convivialité a ainsi lieu entre les artistes et d’autres professionnels du spectacle, favorisant par là des rencontres pouvant permettre à un spectacle de se développer et d’aller à la rencontre d’un plus large public par la suite. Le Festival Off d’Avignon a en effet aussi pris la forme d’un grand marché du spectacle vivant depuis plusieurs années déjà, en plus d’être un endroit de rencontre entre les propositions artistiques et les publics.

Ce soir-là, et pour deux autres soirées, c’est le spectacle Simonetta – Promenade Pop qui est présenté par Caterina Barone et la compagnie Asphalte. L’artiste y incarne Simonetta Vespucci, muse du peintre italien de la Renaissance Sandro Botticelli, dont on peut notamment retrouver les traits à travers la déesse du célèbre tableau : La naissance de Vénus. Cependant, nous apprenons à travers ce spectacle qu’elle n’a pas formellement posé pour le peintre, car les modèles nus n’existaient pas encore à l’époque. Une des nombreuses anecdotes historiques abordées dans cette pièce qui questionne aussi les rapports entre la beauté, l’art et le pouvoir à travers le récit de Simonetta. La mise en scène de Mylène Bonnet, précise et réalisée dans une volonté d’économie des signes employés, permet une grande clarté dans cette belle évocation de la vie de la muse de Botticelli, morte à 23 ans seulement.

La force de cette proposition repose ainsi notamment sur sa forme minimaliste et modulable, qui s’adapte très bien au plein air, et en particulier à l’espace d’un jardin, comme c’est le cas ce soir-là. Car il ne faut pas grand-chose de plus que ce jardin et la qualité d’écriture et d’interprétation de Caterina Barone pour se croire dans le jardin d’un palais florentin du XVème siècle, en présence de Simonetta Vespucci, figure féminine de la Renaissance italienne, hélas en partie oubliée, comme c’est malheureusement trop souvent le cas pour les femmes dans l’histoire de l’art en particulier, et même l’Histoire en général. Heureusement, grâce au travail de la compagnie Asphalte, le modèle de chair et d’os derrière la mythique Vénus de Botticelli sort enfin de l’oubli et prend corps et voix devant le public.
Theatreactu / Hugo Valat / 10 août 2023

Oroonoko, le prince esclave 2019

Le bon spectacle tout public« C’est un spectacle dans lequel il est question d’identité, d’exil, d’échange de cultures, de révolte, sous une forme qui est à la fois épique et assez poétique. (…) ça m’a beaucoup plu parce que c’est un théâtre très musical, il y a un musicien sur scène qui s’appelle Dramane Dembele qui joue des flûtes, des percussions… c’est très beau la façon dont il accompagne le spectacle. C’est le bon spectacle tout public. Pour les enfants c’est très beau, il y a pour les enfants une histoire simple avec un beau souffle épique, et en même temps plusieurs niveaux de lecture pour les parents aussi. Il y a une distribution que j’aime aussi : Caterina Barone, Adama Diop, Yasmine Modestine et Sipan Mouradian. Et c’est une metteure en scène Aline César qui a fait pas mal de spectacles avec les enfants que je trouve intelligents parce qu’il y a toujours de la hauteur de vue et beaucoup d’exigence. »
France Culture / La Dispute, Le coup de cœur d’Anna Sigalevitch / 3 juin 2019
Ecouter La Dispute du 3 juin 2019

Aller et être« Qui connaîtra notre nom ? » : cette mythique interrogation à la fois inquiète et performative sur la visibilité historique des esclaves, qui n’est pas sans évoquer certains prologues de Toni Morrisson, délimite l’horizon épique de ce « grand poème » théâtral et musical qu’a souhaité repiquer Aline César. A partir du roman d’Aphra Behn, autrice anglaise injustement méconnue que Virginia Woolf avait déjà tenté de réhabiliter, elle compose pour cinq comédien.ne.s et musicien.ne.s (avec en figure de proue le génial Adama Diop) un jeune public de grande estime pour toutes les générations, tant il fait la part belle à l’imaginaire par son émiettement de tableaux et l’habilité suggestive de ses accessoires rudimentaires. Ayant l’intelligence de préserver la singularité des points de vue dans la puissance salvatrice de la choralité, et la coulisse du geste narratif par la confrontation critique de l’écrivaine occidentale (Caterina Barone) aux confins inhumains du monde, elle distancie, déniaise et dépsychologise tout l’exotisme fabulateur du conte. Le spectacle incarne alors cette force pure de l’allant qu’initie la fuite d’Oroonoko, l’indomesticable prince esclave, et son fameux slogan existentialiste (« aller et être »), la comédie musicale avec ses rengaines chantées dans toutes les langues et son énergie poétique (imitant parfois celle de Césaire) se transformant elle-même en modeste fugue, dans tous les sens nobles du terme. 
I/O Gazette / Pierre Lesquelen / 17 juin 2019

 

Une belle écriture poétique L’épopée scénique – belle écriture poétique – relève de l’actualité brûlante : l’exil, les migrations, la révolte, l’injustice, la confrontation à l’autre, l’identité et la rencontre des cultures. (…) Un poème théâtral, épique et musical où le récit se construit à vue, porté par des acteurs narrateurs de l’histoire – personnages, témoins, passeurs. La musique tonique est omniprésente, le musicien talentueux Dramane Dembele accompagne le voyage de ses instruments – flûtes peules, n’gôni, tâta, sanza (…). Les quatre comédiens sont multidisciplinaires et polyvalents, à la fois forts d’un jeu individuel et d’une partition collective, avec la rayonnante Catarina Barone qui, de l’anglais au français, raconte et joue, s’enthousiasme ou se met en colère; Nicolas Martel très physique chorégraphie la coupe de la canne à sucre, danse et chante admirablement; la gracieuse Coralie Méride interprète Imoinda, danseuse lumineuse et sage, tandis qu’Assane Timbo, maître de cérémonie et prince rebelle conduit en artiste tout son monde alentour, sur les chemins de l’éveil à soi et aux autres.
Hotello / Véronique Hotte – 4 avril 2021

 

Une fable sur l’identité Au-delà du destin romanesque d’Oroonoko et de l’histoire de l’amitié qui lie la jeune Aphra et le jeune prince, le spectacle met l’accent sur la question de l’identité. Oroonoko, devenu esclave, est dépossédé de son nom et, par la volonté de ses maîtres, devient César avant que la révolte qu’il fomente ne le transforme en Spartacus. Il renvoie la balle à Aphra, qui se mue en Astrea dans ses activités d’espionnage et de plume, en rébellion contre l’ordre établi et le statut fait aux femmes. Leurs changements de noms illustrent leur impossibilité d’être ce qu’ils sont et d’en obtenir la reconnaissance. La société les dépossède d’eux-mêmes en leur ôtant leur nom ou en les contraignant à en changer. (…) Ce spectacle offre une belle opportunité de favoriser la rencontre et de réconcilier au lieu d’opposer. Aline César ouvre une porte vers une histoire qui pourrait bien se finir si on le souhaite et où le dialogue entre les communautés, au lieu d’être rompu, pourrait être porteur d’un nouveau souffle. On n’effacera pas le passé en matière de colonisation. Reste à construire un avenir plus ouvert, plus positif. C’est l’une des leçons de cet attachant spectacle, impeccablement rythmé et plein d’entrain.
Arts-chipel.fr / Sarah Franck / 3 avril 2021

 

Spectacle intelligent et bien rythmé Beau travail de mise en scène et d’interprétation, ainsi que de création des costumes et des lumières, ce spectacle, intelligent et bien rythmé, s’inspire d’une histoire vécue par une anglaise du XVIIème siècle, Aphra Behn ( ….)  Ce nouveau spectacle fait partie d’une trilogie consacrée à Behn et écrite et mise en scène par Aline César. En 2017, elle avait conçu Aphra Behn, Punk and Poetess ; elle est en train de préparer la dernière partie de la trilogie.
A2S Paris (magazine Arts, Société, Sciences) / Rafael Font Vaillant / avril 2021

 

« Oroonoko, de la chaîne à la scène »
Par Outre-Mer la 1ère – France TV Info.fr « L’oreille est hardie » / Patrice Elie Dit Cosaque / 10 avril 2021
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Interview d’Aline César
Par RCF / « TOut DOux » / Vincent Belotti / 7 avril 2021
Ecouter l'émission

Suite Samouraï

Le poème d’une femme moderne

Une chambre d’hôtel, un bateau qui prend le large, un aéroport, une ville sans nom. Autant d’invitations au voyage, de non-lieux, ou pourtant se glisse l’intimité impudique et lyrique d’Aline César. Une intimité à l’image de son spectacle qui nous invite dans son appartement à nous rassembler, à nous serrer, à ne pas chasser le regard. Une complicité forte et troublante d’acteur à spectateur.
Suite Samouraï se construit comme une suite musicale, lyrique, épique : le poème d’une femme moderne qui oscille dans les vertiges de l’amour entre ce qu’on y trouve de plus beau et de plus douloureux. Ce que l’on remarque vite, c’est qu’elle y croque à pleine dent, et a la politesse de nous en partager la saveur. Comme nous avions pu le voir dans son dernier spectacle, Dérives, la poésie ici ne manque pas de style et se retrouve toujours au rendez-vous. Néanmoins, il y a dans sa nouvelle proposition une figure un peu plus narrative qui se dessine au milieu des contours floutés par la poésie. Une histoire d’amour passionnée, racontée également comme un carnet de voyages aux milles paysages exotiques, et frisant enfin avec le thriller. Des registres en somme tout à fait complets et complexes, qu’Aline César aime à surprendre au cours de son spectacle.
La puissance, outre l’écriture tout à fait prenante, est ici accordée une nouvelle fois à l’intimité qui réside dans ce moment partagé. L’invitation à ces différents voyages se fait sans effort dans la quiétude de son appartement. On voudrait boire encore un dernier verre, entendre un dernier poème, avant de claquer la porte et de retrouver le brouhaha d’Avignon.
Un fauteuil pour l’orchestre / Jean Hostache / 5 août 2017


Les coulisses d’un intriguant périple

Aline César nous invite dans son appartement Place des Carmes à Avignon pour découvrir un texte qu’elle a écrit. Il s’agit de Suite Samouraï qui raconte le voyage poétique de l’autrice. Se situant entre polar et histoire amoureuse, sur fond de décor japonisant, Suite Samouraï nous invite dans les coulisses d’un intriguant périple.
Les chansons sont dites avec élégance et le texte est joliment écrit. La musique pop rock se marie bien avec la scénographie. En guise d’objets nous avons une malle qui dévoile quelques secrets au cours du spectacle et des panneaux numérotés comme sur la scène d’un crime. La forme est épurée et sobre.
L’histoire nous embarque de suite en suite, comme dans un hôtel étranger, avec pour compagnon symbolique un crocodile. Le tout est construit comme un puzzle en plusieurs dimensions. Il s’agit d’un spectacle aux composantes multiples. Les objets s’ouvrent et se découvrent comme des poupées russes.
De suite en suite, le spectateur est invité à voyager et à se laisser porter par cette aventure mystérieuse et asiatique. Nous sommes emmenés dans une mélopée douce. La poésie sonore de la pièce donne à voir de belles images. Le tout a un caractère intimiste dans une ambiance tamisée qui convient très bien à l’espace cosy de l’appartement. Nous sortons avec la sensation d’avoir fait un voyage d’homme ou de femme d’affaire en transit, aux confins du rêve et de la poésie.
Le Souffleur.net / Florent Barbera / Brève d’Avignon #2 / 29 juillet 2017

Aphra Behn – Punk & Poetess

Presque une chanson de troubadour, presque un exposé ou un rêve

Chaque semaine, coup d’œil sur l’actualité poétique. Ce lundi, Aline César et sa biographie de la poétesse et metteuse en scène britannique du XVIIe siècle Aphra Behn.

«Aphra Behn (1640-1689) a eu beau être reconnue et célèbre en son temps, elle n’en fut pas moins oubliée et dédaignée.» On pourrait changer le nom au début de cette phrase et la réutiliser en tant de circonstances, à chaque fois qu’on déterre ces femmes méconnues qui avaient réussi la prouesse de s’élever vers des espaces qui ne leur étaient pas ouverts, mais ont perdu en mourant tout le bénéfice de leurs efforts pour disparaître dans les limbes de nos mémoires collectives. C’est un nom ou bien un autre, c’est une découverte des années plus tard, des tâtonnements, des recherches, des retrouvailles. Des biographies en guise de renaissance. Dans ce ballet de la mémoire, Aphra Behn a eu une chance unique : elle a croisé le chemin d’une artiste, Aline César, qui lui a dédié un long récit-poème, à l’écrit et sur scène. Cela donne un ovni indescriptible, presque une chanson de troubadour, presque un exposé ou un rêve, sous forme de livre édité chez Supernova.

On y revit vers par vers la vie d’Aphra Behn, née Johnson : une enfance sous Cromwell, la guerre civile et la campagne du Kent, un mariage, un voyage, un veuvage, une mission d’espionnage. Aphra, veuve Behn, nom de code Astrea, est envoyée par la couronne britannique dans les Flandres, «elle n’est toujours pas payée malgré ses demandes répétées». Astrea, de nom de code devient nom de plume, et Aphra Behn écrit sa première pièce, une critique du mariage arrangé. Elle en écrira en tout vingt, ainsi que des romans et de la poésie, mâtinés de féminisme avant-gardiste. Moqueur, un écrivain parmi ses contemporains écrit d’elle que «pute et poétesse vont si bien ensemble /que tu ne peux être l’une sans être l’autre». Ce sont d’ailleurs ces mots dans leur version originale qu’Aline César a choisis en guise de titre délicieusement anachronique pour son livre, Punk and Poetess. Poétesse et pute, ou poétesse et punk, Aphra Behn est en tout cas selon Virginia Woolf la première anglaise à vivre de sa plume. Et peu de choses la résument aussi bien que son épitaphe : «Ici gît une preuve que l’esprit ne saurait /Suffire à protéger de la mortalité.»

Libération / Camille Paix / 7 mars  2021

 

Une voix qui déboulonne le patriarcat

Espionnage et littérature : qui était Aphra Behn autrice à succès du XVIIe siècle et oubliée très vite après ?
Aphra Behn est surnommée la « George Sand » de l’Angleterre. Au XVIIe siècle, elle fut espionne aux Pays-Bas, puis autrice à succès à Londres, modèle de liberté et féministe, pionnière dans la dénonciation de la colonisation. Un livre et une tournée permettent de la découvrir en France. Comme beaucoup de créatrices oubliées, Aphra Behn fut une autrice et comédienne accomplie en son temps, au XVIIe siècle. Elle a eu du succès, puis a été oubliée pendant près de 300 ans, avant de revenir à grâce à la faveur de recherches récentes. Aujourd'hui, cette femme de lettres, qui fut aussi espionne, est classée en Angleterre parmi les classiques, après un long passage au purgatoire des femmes libres et révoltées. L'autrice et historienne Aline César s'emploie en France à faire revivre ses textes sur scène, et cherche par tous moyens à combler les zones floues d'une biographie qu'Aphra Behn a contribué elle-même à coder. Elle publie cet automne un récit poétique de sa vie, Aphra Behn, Punk and Poetess (Supernova) et propose une version jeune public d'une des œuvres d'Aphra Behn, Oroonoko, prince esclave, en tournée d'octobre à décembre.

Une femme du XVIIe siècle résolue
On sait à peu près sûrement qu'Aphra Behn est issue d'une famille assez modeste. Née en 1640 sous le nom de Johnson, elle a pris le nom de son mari, Behn, mort trois ans après leur mariage. Elle serait allée au Surinam avec sa famille, à l'âge de 23 ans, aurait perdu son père lors du voyage, père dont elle a écrit qu'il était supposé occuper un poste important sur place. Ensuite elle se serait mariée avec Johan Behn, marchand, et serait devenue espionne pour le compte de la couronne d'Angleterre, avant d'enflammer les salons et les théâtres avec ses pièces et ses romans. Envoyée à Anvers en Hollande, elle est l'agent 160, et prend comme nom de code Astrea, qui deviendra plus tard également son nom de plume. Probablement espérait-elle vivre de ce métier, en tout cas elle s'est montrée très efficace. Grâce à son réseau de relations, elle a réussi à savoir qu'une attaque se préparait contre Londres. Elle en a prévenu ses commanditaires mais ils ne l'ont pas prise au sérieux. L'attaque sur la Tamise eut pourtant bien lieu, mais l'espionne n'a pas été payée. Tombée dans la misère, Aphra finit même par être emprisonnée pour dettes. Il lui fallut donc survivre avant tout. « Elle me touche car elle avait trois obsessions », dit Aline César. « Veuve très jeune, à 26 ans, sans héritage, en prison pour dettes, elle ne pense absolument pas à se remarier pour assurer un confort matériel. Elle choisit de travailler comme copiste, puis autrice, et surtout de vivre de sa plume, c'est la première obsession. Deuxièmement, elle souhaite être considérée comme une artiste à l'égale des hommes, et non comme une curiosité mondaine. Enfin, elle souhaitait que son œuvre passe à la postérité et que d'autres femmes écrivent pour le théâtre à sa suite. » Sur ce troisième point, elle n'a pas été exaucée ; quant à son vœu de postérité, il rencontra des mouvements contraires au fil du temps. Célèbre jusqu'au XVIIIe siècle, elle tomba ensuite dans l'oubli, y compris en Angleterre même, avant que quelques chercheurs ou chercheuses, ou féministes, ne viennent exhumer ses écrits.

Une voix pour les esclaves
Avec ses 13 romans, 18 comédies et 2 tragédies, elle a contribué à la naissance du roman anglais, et plus tard elle sera une inspiratrice pour Virginia Woolf. Il faut aussi lui reconnaître d'avoir été une pionnière dans la dénonciation de la colonisation et de ses atrocités. Dans les années 1660, le Suriname est une colonie hollandaise d’Amérique du Sud occupée par les Anglais. Du voyage qu'elle y aurait fait, elle tire un roman qui aujourd'hui encore fait date dans la prise de conscience des méfaits de la colonisation, Oroonoko, publié en 1688, un an avant sa mort. Oroonoko est un esclave noir qui prend la tête d'une révolte, et périt après de multiples mutilations ordonnées par les colons pour le punir. En se mettant du côté des esclaves, elle change le regard sur les conséquences de l'occupation des territoires lointains par les Occidentaux. Le roman a remporté un grand succès au moment de sa sortie et « ce livre a inspiré les abolitionnistes, notamment les abolitionnistes français, et a pris en défaut le regard autocentré des Européens à l'époque », explique Aline César.

Une voix qui déboulonne le patriarcat
La première œuvre d'Aphra Behn est Le Mariage forcé, en 1670, beaucoup plus féministe que la pièce de Molière six ans plus tôt sur ce sujet, puis viendra plus tard La Vierge muette, ou l'Histoire de la nonne, et elle va s'imposer peu à peu comme une autrice donnant aux femmes d'autres rôles que ceux que la bonne société de l'époque attend d'elles. Elle met en scène des femmes qui brillent par leur intelligence et non leur beauté, qui se marient à des hommes dont le caractère est aussi fort que le leur, bref, des femmes qui décident pour elles-mêmes ce dont elles ont besoin. Aphra Behn a du succès, notamment parce qu'elle recueille la bienveillance du roi Charles II, parce que le public la suit, mais elle est aussi très critiquée par ses contemporains, et les puritains qui voient en elle une femme trop libre. « Il y a une charge révolutionnaire dans son œuvre, par rapport à la critique du patriarcat », explique Aline César, qui retranscrit des passages entiers de ses pièces dans son ouvrage poétique Aphra Behn, Punk and Poetess. Punk au XVIIe siècle signifiait « pute », et l'écrivain contemporain de Behn, Robert Gould, lui adresse cette insulte en vers : « For Punk and Poetess agree so Pat, You cannot well be This and not be That » (Car pute et poétesse vont si bien ensemble que tu ne peux être l'une sans être l'autre). La transgression qu'elle propose ne lui est pas pardonnée, ni à elle, ni à ses suivantes. « Quand je demande à mes étudiantes combien de pièces de théâtre écrites par des femmes elles ont vues lors des derniers mois, ça ne dépasse jamais trois, et ce sont des autrices récentes. Il y a un impensé sur la création des femmes des siècles précédents », explique Aline César, qui est aussi enseignante à l'université de Paris III. Ainsi, Aphra Behn fait partie de ces autrices oubliées, malgré l'empreinte qu'elles ont pu laisser.
France Inter.fr / Christine Siméone / 21 septembre 2020

Aphra Behn, l’auteure « punk » Insensé qu’une femme de lettres prolifique, traitée de «punk» au XVIIe siècle, n’ait pas aujourd’hui les honneurs des bibliothèques. C’est le drame d’Aphra Behn (1640-1689). Aphra qui ? Une Anglaise qui rêva qu’on «accorde à ses vers l’immortalité». Elle émerge de trois siècles d’éclipse alors qu’elle fut la première auteure à vivre intégralement de sa plume. Vingt pièces, moult novels, ces courts récits en prose et un best-seller de son vivant : Oroonoko ou la véritable histoire de l’esclave royal, histoire d’un prince esclave au Surinam qui se révolte, ouvrage qui inspira les abolitionnistes. Femme libre, s’exprimant sur la place publique, elle fut traitée de punk, qui signifiait «pute» à l’époque, joua les espionnes à Anvers sous le nom de code Astrea, pour Charles II, et - ô outrage - compara le mariage forcé à la prostitution. Si Virginia Woolf la mentionne («Toutes les femmes en chœur devraient déposer des fleurs sur la tombe d’Aphra Behn […] car c’est elle qui obtint, pour elles toutes, le droit d’exprimer leurs idées»), il faut attendre les féministes américaines des années 60-70 pour qu’Aphra Behn sorte de l’ombre. En France, une poignée d’admirateurs s’échine à la faire connaître, dont le traducteur Bernard Dhuicq (disparu en 2013), la chercheuse Edith Girval (dont la thèse doit bientôt être publiée), et Aline César (présidente de HF Ile-de-France).
Libération / « Et la femme créa » / Catherine Mallaval et Johanna Luyssen / 19-20 septembre 2015

Une artiste « à la marge des courants idéologiques dominants » Aline César crée une forme légère autour de la vie et de l’œuvre de l’auteure anglaise Aphra Behn (1640 – 1689). Une forme entre lecture, narration et musique, au sein de laquelle Catherine Rétoré et Dramane Dembele nous transportent dans l’univers d’une artiste atypique.
Ecrivaine célèbre de son vivant, Aphra Behn (1640 – 1689) est aujourd’hui tombée dans l’oubli. Mariée puis veuve à 26 ans, espionne pour le compte de Charles II d’Angleterre, exploratrice parcourant le monde, traductrice, auteure prolifique d’une vingtaine de pièces, elle fut l’une des premières femmes à vivre de sa plume. C’est cette personnalité insolite que l’écrivaine et metteure en scène Aline César a choisi de mettre à l’honneur à travers plusieurs créations, dont une présentée au Théâtre de Saint-Maur.
« Modèle de liberté et féministe avant la lettre, explique la fondatrice de la Compagnie Asphalte, Aphra Behn n’est pas seulement pour moi une épigone singulière, elle pose aussi la question de la légitimité, de la possibilité de créer et de la nécessité de se positionner parfois à la marge des courants idéologiques dominants. C’est pourquoi je mène un travail d’écriture et de mise en scène autour d’Aphra Behn, c’est pourquoi je pourrais aussi revendiquer cette épithète “Punk and Poetess” ». de textes (pour la plupart inédits), éclairages biographiques : une plongée en mots et en musiques au cœur d’une destinée hors du commun.


La Terrasse / Manuel Piolat Soleymat / 27 septembre 2017 - N° 258

Dérive - solo

La beauté symphonique d’une artiste envoûtante Une expérience intime et privilégiée : la poésie d’Aline César chantée et chuchotée dans un appartement.
On vient réserver sa place au théâtre du Girasole, et c’est ainsi que la « dérive » commence. On s’y rend, non loin mais hors du théâtre dans un bel appartement, pour assister à la performance d’Aline César, qui nous accueille chaleureusement avec de délicieux vins régionaux. Quand tout le monde est arrivé, on passe dans la pièce à côté pour cette fois-ci vivre la « dérive », c’est-à-dire écouter une joute poétique qui décroche au temps un morceau d’éternité…
Se rendre à la « dérive » est une expérience unique de par la proximité que le spectateur entretient avec l’interprète tout au long de sa représentation. On lui propose de rentrer doublement dans son intimité, non seulement car il est invité dans son espace de vie (c’est-à-dire son appartement), mais également car il se voit plonger dans son écriture poétique qui lui est très personnelle et singulière. Comme les plus beaux poèmes de la littérature, le sens nous échappe par moment, on le perçoit par bribes, mais la beauté nous transporte toujours, et la musicalité ne quitte pas une seconde les lèvres de l’artiste qui a le plaisir de goûter ses mots. Certains poèmes sont parlés, d’autre brillamment chantés, mais toujours vécus avec émotion. Se rendre à la « dérive » c’est aussi se laisser surprendre par l’émergence de « guests », soigneusement invités par l’interprète pour venir colorer son style d’une autre rencontre artistique. La liste de ces invités est longue, et changeante tout au long du festival. Se rendre à la dérive est en somme prendre le temps de côtoyer la poésie, d’écouter le bruit du monde, la beauté symphonique d’une artiste envoûtante.
AVI Local City News / Jean Hostache / 14 juillet 2015.

 

Des invités plus que des spectateurs « Festival Off d’Avignon : du théâtre un peu partout - Des invités plus que des spectateurs attendus dans le salon d’Aline, et une libre participation aux frais, c’est le théâtre buissonnier d’Avignon. »

 


TF1 Journal télévisé de 20 heures / Marion Gautier / 22 juillet 2015.

 


Un texte de voyage et de rencontre Il est rare d'entendre de la poésie sur scène. Il est encore plus surprenant d'en écouter dans un appartement, en petit comité, verre de vin à la main. Aline César nous propose un texte de voyage et de rencontre, des mots poétiques qui parlent d'une corniche, on ne sait trop où. A vous de l'imaginer. Chaque soir, un artiste-ami est invité, et à deux, la puissance du verbe n'en est que plus forte. Il y a beaucoup de texte dans cette pièce, mais à ceux qui veulent un peu de répit, l'actrice chante aussi, accompagnée de sa boîte à rythme. Et c'est peut-être ses plus beaux moments. Assis à deux mètres d'elle, dans son salon, c'est une expérience théâtrale en soi pour les spectateurs qui devront, pour l'apprécier, être des amoureux du verbe et des découvertes.
La Provence.fr / Festival d'Avignon-Avignon Off : les critiques - Dérive (****)/ Margaux Wartelle / 24 juillet 2015

 

Avec ses mots, Aline nous embarque Aline César joue « à domicile ». Au Girasole, du théâtre en appartement
Passez la porte, vous êtes chez Aline. Prenez un verre, vous êtes entre amis. L’actrice-autrice accueille dans sa cuisine, dans son salon. Et chaque jour, un nouveau compagnon de création l’accompagne : musicien(ne) ou comédien(ne).
Ce soir-là, nous sommes arrivés en avance chez Aline. A sept minutes à pied du Girasole, nous avons suivi les indications du plan, fourni avec notre ticket. Au 1, rue ***, la porte est déjà entrouverte. Une voix nous invite à monter. A l’étage, c’est le choix du roi : « rouge, blanc, rosé ou eau citronnée ? » Cinq personnes discutent, verre à pied dans les mains. On passe au salon, tout en douceur. Une douceur que l’on retrouve dans la voix d’Aline, qui nous raconte une histoire. Des mots qu’elle a écrits pour évoquer la ville, la rêverie, l’amour aussi. S’il y a bien une trame narrative, au fil d’un voyage le long d’une corniche, le texte permet de s’échapper. Aline chante aussi. De sa boîte à rythme sortent des sons électroniques. Et de sa voix claire, Aline prend des airs de Serge Gainsbourg ou d’Alex Beaupain, selon votre sensibilité. Ici, on est hors des conventions du Festival. Un temps de répit, de calme. Ici, le prix est libre.
Aline César a déjà monté sept spectacles avec sa compagnie Asphalte. Avec « Dérive », elle compte bien continuer à tourner. Mais loin des salles, toujours en appartement. Créer une autre forme d’intimité, un autre rapport à la scène et au texte. Le but est atteint. «  Je dérive, je parcours en rêve les dévers / Je prends à revers les rives et les amers ». Avec ses mots, Aline nous embarque. Et on est consentants.
La Provence / Margaux Wartelle / 24 juillet 2015

 

Comme un road-movie A l’image du bon vin qu’on nous propose en arrivant dans ce petit salon du *** place des Carmes, la poésie d’Aline César nous enivre.
Elle a en elle le don de l’accueil, le savoir-faire de l’intimité. Dérive, joute poétique en appartement, vient nous bercer. C’est comme prendre le temps d’une pause, où les minutes sont en suspens, lors d’une journée chargée au sein des remparts. Son écriture fonctionne comme un road-movie, faisant traverser à celui qui tend l’oreille de bien beaux paysages aux couleurs chatoyantes.
Il s’agit aussi de musique, de chant qu’elle vient interpréter, mais aussi d’une série de « guest », que la poétesse invite au cours de sa représentation à venir exprimer leurs divers talents. On sent chez elle le plaisir des mots et de la langue qu’elle vient tordre pour donner un sens nouveau, cette brèche délicate où la métaphore sublime le réel. C’est aussi une passion de conteuse, une générosité à nous réunir pour raconter un récit.
Dérive est un temps à attraper au vol, une expérience universelle à apprécier et à partager tout au long du festival.
Un fauteuil pour l’orchestre
/ 14 juillet 2016

 

Place des Carmes, les mots dits en appartement. Dérive est davantage une performance qu’un spectacle. L’ambiance est détendue, intime, et pour cause : nous ne sommes pas au théâtre, pas dans la rue, mais dans un appartement sobrement décoré, un verre de vin ou d’eau citronnée à la main. Des guirlandes lumineuses jonchent le sol et donnent au décor une atmosphère encore plus douillette. Toutes les conditions sont réunies pour passer un moment agréable, calme, pour faire un voyage.
A l’intérieur de ce cocon, Aline César offre sa poésie avec force et simplicité. Elle entraîne son auditoire sur des routes sinueuses, semées de doutes, d’obstacles et d’amour et de désir.
Un véritable lien se crée entre elles et ceux qu’elle préfère appeler ses « invités » : des regards s’échangent tout au long de la performance, et Aline César réussit parfaitement à créer un moment unique.
Ce lien permet aisément d’imaginer les routes, les décors de la ville dont elle parle « Cela faisait longtemps que j’avais envie de créer quelque chose sur la dérive urbaine… ». (…)
Lors de cette performance d’une heure dont les textes sont tantôt récités, tantôt chantés, Aline César reçoit un-e invité-e surprise, qui offre aux convives son propre moment de dérive, dans lequel les invités se laissent porter avec plaisir.
La Provence
/ Supplément Sortir / 20 juillet 2016


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Aide-toi le ciel - 2016

Un spectacle à découvrir d’urgence Dans le rythme frénétique d’une grande ville déshumanisée, deux familles se retrouvent contraintes de partager le même appartement. (…) Dans une mise en scène originale où se côtoient différents îlots représentant les couloirs des transports en commun, le salon et la salle de bain, le public suit chaque personnage dans son épopée quotidienne (…) Ce tourbillon de vie dans lequel malgré tout on s’aime, on se quitte, on rêve et on se cherche est entrecoupé de chansons, de musique et de mouvements de danse qui sont l’expression de l’intériorité de chacun des personnages.
Une thérapie urbaine collective. Cette pièce d’Aline César qui oscille entre drame et humour absurde apporte un éclairage particulier sur toutes les petites phrases assassines qui font partie du langage commun « Quand on veut on peut », « Aide-toi le ciel t’aidera » etc. (…) Les spectateurs usagers des transport en commun pourront également exorciser leurs frustrations quotidiennes en se régalant des parcours des différents personnages dans les itinéraires (…) Un spectacle à découvrir d’urgence. 
Esprit Paillettes.com / Perrine Carpentier / 18 janvier 2016

Une postmodernité à l’arrière-goût 1984 Sur un tableau noir est dessiné à la craie le plan d’une ville dont les jeunes Lucie et Jonathan nous livrent symboliquement la clé, nous en expliquant la sectorisation et les itinéraires obligatoires, puis en nous racontant la légende du mystérieux transbordeur disparu, aux pouvoirs étranges, qui à une époque assurait la traversée du canal. Le paysage tracé est donc urbain contemporain, en apparence ordinaire, mais en réalité cette cité phagocytaire dépeint une postmodernité à l’arrière-goût 1984. (…) Les six personnages se débattent, malgré eux, tels des pantins s’agitant au gré des trajectoires automatisées prédéfinies par le système, impitoyable. Leur quotidien est une absurde et impossible course à la gestion du temps, imposée par la réglementation stricte, déshumanisée à l’extrême. Les tensions montent, à l’extérieur, comme au sein du foyer, les adultes sont sur le point de baisser les bras, les jeunes ne croient plus vraiment à l’avenir. Face à cette désespérance, l’unique issue semble être l’effrayant transbordeur, à qui chacun va finir par faire appel. Mais est-ce vraiment la bonne solution ?...
La pièce est certes dérangeante, mais dans le bon sens du terme, car elle nous fait prendre conscience du danger de la régulation généralisée, de l’instrumentalisation, de la manipulation du fonctionnement automatisant de ces métropoles de plus en plus prédatrices de libertés. (…)
Les comédiens sont convaincants, attachants, troublants même... Ils sont à fond, entiers, ils vont jusqu’au bout de leur enthousiasme, comme de leurs souffrances. Ils évoluent avec précision, force et dextérité. Ils chantent, ils dansent aussi, ils se dédoublent et redoublent d’énergie dans l’espace scénique créé par des jeux de lumières. Il y a de beaux plans cinéma. Le message passe. Définitivement, il faut comprendre et résister, aidons-nous, aidez-vous, aidons-les, allez les voir !
Regarts.org / Luana Kim / 17 janvier 2016

Un autre monde « C'est un monde où pourraient se confronter, Georges ORWELL, KAFKA ou Alfred JARRY. Un autre monde, où les personnages ne peuvent plus supporter leurs positions sociales, et les tensions familiales. »
Sorties à Paris / Fabienne Schouler / 17 janvier 2016

Six comédiens très expressifs et toniques Cette pièce jouée sur la scène du dynamique « théâtre de Belleville » par 6 comédiens très expressifs et toniques, nous entraîne dans l’histoire d’une famille recomposée qui loge chez la première épouse du père pour cause économique, avec en fond, une ville géante et codifiée, non matérialisée. (…) Derrière des chants, des danses, des chorégraphies, existe bien une vision politique incitant le spectateur à réfléchir et à ne pas répéter des phrases lapidaires, définitives et culpabilisantes. Cet éclairage par le théâtre est intéressant et pose la vraie question : la vie de chaque être est-elle tracée d’avance ou bien est-il possible de savoir profiter du hasard ?
Sortiz.com / Christian Le Besnerais  / 15 janvier 2016

Un coup de pouce au destin La compagnie Asphalte donne un coup de pouce au destin : Aide-toi le ciel…( …) Suffira-t-il d’un nouveau cœur, d’un nouveau cerveau, d’autres yeux pour enfin surmonter la nécessité et prendre son destin en main ? On peut quand on veut, dit l’adage paternaliste et libéral.
La Terrasse / Catherine Robert / janvier 2016 - N° 239

Une création originale et pertinente La proposition de Aline César est aussi ambitieuse que hardie, d'une part, en la forme, celle du conte dystopique dans lequel, paradoxalement, elle injecte une composante fantastique et des chansons.(…) Aide-toi le ciel se situe dans un futur qui peut être considéré comme relativement proche, et une société de surveillance et de contrôle foucaldienne dans laquelle les individus se débattent non seulement dans des situations contraignantes et stressantes, voire inextricables, mais subissent une violence psychologique infligée par des tiers mais également auto-infligée dès lors qu'ils se considèrent comme responsable de leur échec. (…)
La scénographie simple mais astucieuse de Catherine Teilhet rend crédible la situation, ce qui est méritoire car grande est la difficulté, et la mise en scène d’Aline César (…) mise fort judicieusement sur la gestuelle et la dramaturgie du corps pour trouver le juste équilibre entre vraisemblance et étrangeté. Investis, tous les comédiens sont justes au jeu et au chant.
Une création originale et pertinente à inscrire à l'actif de la Compagnie Asphalte qui avait déjà séduit dans un registre totalement différent avec Trouble dans la représentation.
Froggy’s delight/ Martine Piazzon / 24 janvier 2016

Interview d’Aline César Par Radio Libertaire « Tempête sur les planches » / Thomas Hahn / 10 janvier 2016


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Oroonoko, le prince esclave

Alchimie sur les planches du Grand Parquet Les acteurs apparaissent et trouvent leur place dans le décor épuré. Aphra Behn s’adresse au public et fait exploser la distance entre elle et son spectateur. Son rôle de témoin et d’acteur se construit sur des fragments d’épisodes autobiographiques. En effet, la pièce s’inspire de l’œuvre d’Aphra Behn Oroonoko datant de 1688 pour expirer un souffle inédit de réinterprétation vivante. (…) La compagnie Asphalte digère l’œuvre d’Aphra Behn pour accoucher d’une pièce enivrante. La mise en scène moderne enchante par son formidable pouvoir d’évocation. Elle incarne cette douloureuse oxymore du prince esclave dont la perte d’identité se reflète dans le décor, les costumes et le jeu. César-Oroonoko voit sa dignité d’homme balbutier dans sa révolte polyphonique. (…) La force de la représentation réside dans le talent des acteurs. Les costumes sont sobres mais délicats, en parfait accord avec l’intention de la mise en scène. Les voix et les corps s’enlacent et fusionnent, le chant se transforme en prolongement naturel de la parole. Oroonoko est l’occasion d’une complicité entre le mouvement et la phrase. Les textes sont splendides et séduisent l’esprit envoûté du spectateur. L’émotion du spectateur voyage grâce aux affinités exotiques entre les flûtes de pan, le tam-tam, les guitares électriques et les cris des dissidents. Oroonoko est la rencontre entre acteurs et spectateurs. La pièce aborde la question de la relativité du concept de la barbarie et souligne l’ensauvagement de l’européen. Toutelaculture.com / Hélène Gully / 24 novembre 2013
On sort ébranlé Quatre acteurs, tous excellents, entrelacent les époques, les personnages et les lieux, la voix de la narratrice et celle d'Oroonoko, entre épisodes dialogués et chorégraphies, de l'Afrique au Surinam, dans la colonie anglaise, à la cour du grand-père fourbe, au cœur de la forêt indienne. Le flux est sans rupture et rythmé dans la diversité des musiques jouées sur instruments africains. 
On sort ébranlé de ce procès d'une liberté d'esprit étonnamment moderne qui évite les pièges des bons sentiments. 
Cendres corps et sang jetés aux quatre coins du monde… Spectacles-selection.com / Lettre n°360 / Annick Drogou / 18 novembre 2013
Un spectacle d’une très grande beauté Ce texte est rare, unique peut-être : L'histoire vécue d'une aristocrate anglaise qui prend fait et cause pour cet homme de sang royal, passant outre tous les discours racistes qui fleurissaient à l'époque, jusqu'à prendre des risques pour lui. Une histoire riche, faite d'aventures, de combats, de trahisons, d'amours, d'injustices, de révoltes et une succession infinie de coups du sort. Aline César s'est inspirée du roman d'Aphra Behn pour monter un spectacle d'une très grande beauté, avec une musique live (jouée par Dramane Dembele, multi instrumentiste de talent), des projections vidéo qui plongent la scène dans des climats mouvants comme les sables de la mémoire, des chorégraphies douces et un montage de scènes vif et imagé. Regarts.org / Bruno Fougniès / 12 novembre 2013
Le spectacle est enlevé, esthétique au possible Ce spectacle tombe à point nommé en une période où l'on s'interroge sur les velléités de retour de cette " bête immonde " jamais tout à fait morte et qu'il conviendrait pourtant d'éradiquer alors que nous constatons que chaque époque invente de nouvelles formes d'esclavage… Je m'empresse d'ajouter qu'en dépit de la gravité du thème, le spectacle est enlevé, esthétique au possible et par conséquent agréable à voir et entendre. Qu'on se le dise !... Theatrauteurs.com / Simone Alexandre / 15 novembre 2013
Cette parole que je trouve nécessaire C’est un très très beau travail, fait avec certainement moins de moyens que le Cosmos de Joris Mathieu dont on vient de parler. Moi je trouve que c’est une belle entreprise dans tous les sens du terme, que ce soit de faire connaître cette femme, Aphra Behn, qui a vécu fin du 17ème dans les années 1680 et un peu avant, de revenir sur l’esclavage à travers le destin de ce prince qui a été trahi par deux fois (…). Sur le plateau quatre comédiens et un musicien pour délivrer cette parole que je trouve nécessaire, cette parole d’Afrique en Amérique. Nous voyageons avec eux, et c’est l’auteure qui nous conduit puisqu’elle est un des personnages, elle est le narrateur et joue également d’autres personnages. C’est assez onirique en même temps, il y a des décors très intéressants de draps noués, il y a quelques masques, et puis la musique africaine mais pas trop, c’est assez subtil. Et puis c’est bien d’avoir un plateau mixte, dans tous les sens du terme, de temps en temps. Radio Aligre / « Les sincères » / Viviane Matignon / 18 novembre 2013 Ecouter : https://soundcloud.com/les-sinceres-theatre/les-sinc-res-aligre-fm-du-18 Retour

Un spectacle très fluide et très finement adapté « J’ai un autre coup de cœur : c’est Oroonoko le prince esclave, de et mis en scène par Aline César d’après le roman d’Aphra Behn. (…) C’est un texte qui dénonce avec beaucoup de violence la barbarie de l’esclavage, ça se passe des côtes africaines au Surinam, à la fin du 17ème siècle. Les acteurs sont tantôt narrateurs, tantôt incarnés, il y a un musicien sur scène qui joue sur des instruments africains, il a notamment un morceau de flûte où il chante en même temps qui est absolument magnifique. C’est un spectacle très fluide et très finement adapté que je recommande.» France Culture / « La Dispute » Coup de cœur / 25 novembre 2013 Ecouter : http://www.franceculture.fr/emission-la-dispute-la-bonne-ame-du-se-tchouan-todo-el-cielo-sobre-la-tierra-2013-11-25

On est dans la tragédie, on est chez Shakespeare « Quelle histoire extraordinaire que celle de ce prince africain venu des côtes d’Or (…)Très belle idée donc que d’adapter le roman pour le théâtre. (…) L’histoire est extraordinaire. Si on a assisté à ça, ça ne m’étonne pas qu’on ne l’oublie pas, qu’on ait besoin de raconter. Oroonoko est fait de cette étoffe, on est dans la tragédie, on est chez Shakespeare. (…) On le voit vibrer, ça bouge en lui, ça le brûle et c’est extrêmement théâtral. (…) On est par la musique, très belle, par le chœur, dans la tragédie, parce que c’est une tragédie, ça se termine mal. (…) C’est une grande histoire, un grand personnage, un grand théâtre. » Radio libertaire / « Tempête sur les planches » / Thomas Hahn / 24 novembre 2013 Ecouter : http://media.radio-libertaire.org/backup/47/dimanche/dimanche_1400/dimanche_1400.mp3

Trouble dans la représentation

Ces fictions 1 à 8 ne sont que l'infinie réalité Après avoir gagné le « Paradis » (la toute petite salle en haut du théâtre du Lucernaire), on pénètre dans un « laboratoire contemporain » dont tout le fond de scène est occupé par un grand écran. Devant nous, quelques colonnes lumineuses, un bureau, un téléphone, un magnétophone, des éprouvettes, un poste de télévision. Des feuillets numérotés de 1 à 8 jonchent le sol.
Elle et Lui, interprétés par Catherine Rétoré et Malik Faraoun, sont catapultés dans le laboratoire après avoir été littéralement « extraits » du vieux film muet dans lequel on vient de les voir jouer une scène d'amour romantique.  A présent, ils deviennent les cobayes de quatre laborantines qui les utilisent pour interpréter des moments canoniques de la relation homme/femme, les fameuses fictions 1 à 8.  Ces moments sont fondés sur la citation, la lecture, l'interprétation de scènes. Citons par exemple Elizabeth Badinter, un passage de Bridget Jones, la scène culte du Mépris de Jean Luc Godard. L'alternance entre le jeu des acteurs sur scène et les images des laborantines projetées, permet de pointer efficacement du doigt les inégalités de genre pour servir un spectacle revendicatif.
Si le désir d'originalité de la mise en scène est à saluer, l'omniprésence à l'écran des laborantines confère aux deux acteurs un rôle finalement plus secondaire dans la réflexion conduite par le texte. Cette mise en abyme concernant les acteurs aurait peut-être mérité une meilleure exploitation : on les sent un peu déroutés lorsqu'ils deviennent spectateurs de cet écran envahissant. La confusion peut aussi s'emparer parfois des spectateurs quand se mélangent texte projeté, discours de laborantine et voix d'acteur. Malgré ces quelques défauts, soulignons la pertinence du choix des textes, au service d'une problématique cruciale : l'inégalité statutaire que la société entretient autour des rôles professionnels, sociaux, personnels et intimes de l'homme et de la femme. Ce trouble dans la représentation dit au fond magnifiquement la représentation du trouble qui s'empare de nos sociétés face au statut de la femme. Ces fictions 1 à 8 ne sont que l'infinie réalité.
Regarts.org / Ivanne Galant / 26 janvier 2014

La performance du genre Sylvia Duverger. Ce sont les normes de genre, les stéréotypes de genre que votre pièce entend troubler, en tant qu'ils sont dramatiques (dans tous les sens du terme) ?
Aline César. Ce laboratoire est aussi une espèce de « théâtre anatomique » : un lieu conçu pour disséquer et pour montrer. Ce qui est donné à voir ici c’est un peu la fabrication du genre, les normes et stéréotypes de genre comme vous le dites, mais surtout la réalité tangible des inégalités femmes-hommes.
S.D. Ce sont, me semble-t-il, les représentations de ce que sont ou devraient être les femmes – ce que vous appelez la fiction de la beauté, de la maternité, etc., autrement dit les stéréotypes genrés – qui sont convoquées et examinées...
A.C. Oui, en effet, mais c’est une vision trouble, ou troublée. Tout le contraire d’une mise à plat : un peu comme lorsqu’on regarde un film en 3D sans les lunettes spéciales, il y a un effet de flou et de superposition de plans qui gêne et en même temps produit une représentation nouvelle. C’est ce que j’ai cherché à faire dans le dialogue permanent entre l’actrice et l’acteur sur le plateau et les laborantines en blouse blanche qui apparaissent dans l’écran : elles questionnent et tiennent des propos tantôt farfelus, tantôt franchement rétrogrades, ou au contraire radicaux. Tout se joue pour moi dans le frottement entre le plateau et la vidéo, avec au premier plan des personnages de fiction en chair et en os et au second plan une parole de « spécialiste » mise à distance par la vidéo. Je réalise aussi, à regret, combien le spectacle a pris une dimension plus subversive qu’au moment où je l’ai écrit, il y a deux ans. Je pense, par exemple, au passage sur la « fiction » de la maternité, pour lequel je me suis appuyée sur des textes de Virginie Despentes et sur un rejeu [1] d’une interview d’Elisabeth Badinter : je réalise en réentendant ces textes à quel point ils provoquent dans le contexte des polémiques actuelles sur l’avortement, la famille, les VigiGender. Ça c’est dramatique en effet.
Nouvel Obs / Blog Féministes en tous genres / Sylvia Duverger / 25 février 2014 Lire l’intégralité de l’entretien

Les hommes, les femmes, la déco d'intérieure et la trépanation du mammouth… A travers un laboratoire du genre, une pièce de théâtre interroge nos représentations des éternels féminins et masculins. Un spectacle qui devrait être remboursé par la sécurité sociale. Lui, un brin dominateur, se fait pressant. Elle, regard de biche éperdue, tente de se soustraire à son étreinte... Deux acteurs, un homme, une femme sont interrompus lors de leur cour amoureuse, « extraits » d’un film muet des années 20 et propulsés dans un laboratoire contemporain. Ils découvrent qu’ils ont été kidnappés par des chercheuses un brin déjantées et doivent se soumettre à une série d’expériences sur le masculin et le féminin.
C’est le point de départ de Trouble dans la représentation, une pièce de l’auteure et metteuse en scène Aline César qui balaye très utilement bien des clichés. Sa pièce, pleine de fantaisie, devrait être remboursée par la sécurité sociale et sera vue avec profit par les deux sexes. Elle apporte un contrepoint éclairant à ces pièces et livres au succès indécent qui surjouent et confortent les stéréotypes masculins, tout en les prétendant « scien-ti-fi-que-ment documentés ». (…) Pour réintégrer leur pellicule originelle, les deux acteurs doivent lire plusieurs textes. Elisabeth Badinter, Judith Butler, Hélène Cixous ou la féroce Théroigne de Méricourt. Mais aussi Rousseau et son déterminisme biologique, Marivaux et ses querelles domestiques, Moravia ou Godard et leur vision de la beauté. Tandis que les chercheuses commentent leurs performances de rats de laboratoire, l’homme et la femme dissèquent et mettent en évidence la fabrique du genre, des stéréotypes et des inégalités. Ce système a un coût social énorme, pour les filles mais aussi pour les garçons d’aujourd’hui (…). Pourtant, comme le dit l’acteur à un moment, empruntant ses mots à Virginie Despentes: « Il y a des hommes plutôt faits pour la cueillette, la décoration d’intérieur et les enfants au parc, et des femmes bâties pour trépaner le mammouth, faire du bruit et des embuscades ».
Sciences et Avenir blog de la rédaction / Rachel Mulot / 29 octobre 2012

Une amusante partition de "démontage des fictions" Avec Trouble dans la représentation, Aline César aborde la question de la représentation du féminin de manière miroir par rapport à celle du masculin dans des domaines considérés comme ceux dédiés de la femme tels la beauté et la maternité. (…)
A partir d'une sélection de textes de toute époque et différente nature, de Helen Fielding à Elisabeth Badinter en passant par Virginie Despentes, du déterminisme biologique de Rousseau au portrait de femme d'Alberto Moravia immortalisé par la scène culte du film de Jean-Luc Godard, elle a composé une amusante partition de "démontage des fictions" dans laquelle deux acteurs de films muets, kidnappés par d'extravagantes conférencières-chercheuses allumées, sont chargés d'éprouver la crédibilité des clichés et des représentations .
Dans un dispositif scénique qui évoque davantage un studio d'enregistrement qu'un laboratoire, les deux protagonistes sont confrontés aux directives d'une équipe essentiellement féminine de pseudo-scientifiques interprétées de manière décalée par Gaëlle Hausermann, Yaël Elhadad, Lara Marcou, Blandine Pelissier et Niryis Pouscoulous qui interviennent uniquement par projection d'images vidéo. Sur scène, le spectacle (…) bénéficie de la participation des deux excellents comédiens que sont Catherine Rétoré et Malik Faraoun.
Froggydelight.com Martine Piazzon / 28 octobre 2012

Un spectacle dérangeant et leste Trouble dans la représentation. Titre plus qu’intriguant : vous avez l’impression que vos yeux et vos neurones vont partir en vrille. Et c’est bien ce qui risque de se passer avec cette succession de textes décapants qui décrivent les rapports homme-femme, dénonçant la façon dont on traite encore de nos jours ceux-ci face à celles-là. (…) Catherine Rétoré et Malik Faraoun sont les interprètes de ce spectacle dérangeant et leste.
De jardin à cour blog / Marie Ordinis / Blog 25 octobre 2012
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La fin des voyages

Jusqu’à bout du monde Une lecture jusqu’à bout du monde. Pour aller jusqu’au bout d’un monde, le Petit Louvre accueille La fin des voyages, une lecture mise en espace et en musique. (…) Cette rencontre invite à un voyage aux confins de deux mondes géographiques, mais aussi entre réalité et monde onirique. (…) On risque fort de se sentir pousser des ailes.
Le Dauphiné libéré / juillet 2010
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Aide-toi le ciel

Un programme stimulant et vivifiant Une pièce d’Aline César qui remet en question la croyance en un destin social et les discours dominants qui le définissent comme tous nos conditionnements... Inscrite dans un projet artistique centrée sur la problématique « inégalités hommes-femmes et inégalités sociales », cette création de la compagnie Asphalte, dont Aline César signe le texte et la mise en scène, prend le contre-pied des petites phrases habituelles, lapidaires et définitives sur le destin social comme « on n’a que ce qu’on mérite », « si tu veux tu peux », « aide-toi le ciel t’aidera », etc. Elaborée en partie à partir d’un atelier de recherche avec les six comédiens et d’une collecte de paroles d’habitants à Arcueil et à l’Ile-Saint-Denis, la pièce urbaine et familiale inclut un personnage extraordinaire permettant aux individus en détresse d’échanger un organe identifié comme la cause de leurs maux : cœur, yeux, cerveau... Un échange qui questionne la perception du monde et de soi et qui devrait ici permettre de décrypter avec finesse comment des croyances sociales profondément ancrées font passer les inégalités sociales pour un destin. Question complexe, à la fois politique et éthique, explorée par de multiples sociologues, à commencer par Bourdieu, que le théâtre peut éclairer avec pertinence tant les situations métaphoriques peuvent en dire long sur le réel. « Le ciel a bon dos » ... et déjouer les justifications faciles des inégalités est un programme stimulant et vivifiant. A découvrir !
La Terrasse / Agnès Santi / novembre 2009 - n°172

Contredisant l’adage, s’en fout le ciel Dans Aide-toi le ciel, Aline César met en scène le thème des inégalités sociales. Après une résidence en Seine-Saint-Denis, la compagnie Asphalte œuvre désormais sur le terrain du Val-de-Marne où elle a rencontré des publics à la marge. Leurs paroles ont inspiré le texte Aide-toi le ciel...
On connait la suite de l’adage chrétien, ici amputé net pour désigner la violente culpabilisation qu’il assigne aux plus démunis, lesquels souvent « voudraient » bien réussir, comme on dit, s’extirper d’un quotidien frustrant, mais ne le « peuvent » pas : pour des raisons qui n’ont rien à voir avec le ciel et sa fatalité. Ce postulat en tête, Aline César a imaginé les heures et les jours d’une famille, recomposée, et logée provisoirement chez la première épouse du père. Les parents, sous pression financière, et leurs grands adolescents, hagards par rapport à un avenir précaire ou obnubilés par un examen, s’arrangent de l’étroitesse d’une maison et surtout évoluent dans une ville géante, dévorante. Ville, non matérialisée ici, tout en ruptures, quadrillée de codes et de contraintes sonores, qui se pose judicieusement en métaphore de la vie, corsetée de toutes parts, et du social. Adepte d’un théâtre visuel dont les images cherchent à percuter, la compagnie est dotée de comédiens expressifs au bel abattage, parmi lesquels Catherine Rétoré se distingue par sa grâce et sa vérité. Dans Aide-toi le ciel, plusieurs instants enlevés résonnent de sincérité et analysent avec sensibilité le combat ordinaire, intime ou plus collectif, de ceux à qui rien n’est dû d’emblée. L’Humanité / Aude Brédy / 8 décembre 2009
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1962

L’amour entre la France et l’Algérie En résidence à Pierrefitte depuis 2004, la compagnie de théâtre d’Aline César a pour but de produire des représentations positives des populations d’origine immigrée. Sa dernière création, 1962, évoque cette date où l’Algérie gagne son indépendance suscitant espoir et déception. La première se joue le 26 octobre dans le cadre du Festival Villes des Musiques du Monde. Il y a treize ans, Aline César, française et adoptée, apprend qu’elle a été conçue en Algérie. « Cette révélation fut comme une claque. Au milieu des années 90 la télévision et les journaux déversaient sans arrêt les images de villages ensanglantés par le FIS. Au même moment, on parlait des échaufourrées de Mantes-la-Jolie et des « feux de joie » allumés dans les banlieues. Et je découvrais Omar Khayyâm, Ibn Arabi, Khalil Gibran, et Les Mille et Une Nuits évidemment ». Aline a alors l’idée de se servir du théâtre pour revaloriser et réconcilier. (…) « Pour moi c’est un des seuls textes traitant de cette période qui raconte l’amour entre la France et l’Algérie » souligne le comédien Malik Faraoun.
Echo d’Ile-de-France / Myriam Léon / 25 octobre 2007
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Monsieur chasse !

Un classique revisité avec talent Dans un décor psychédélique, tout d’orange, de monstrueux canapés et de meubles en plastique, un jeune couple bourgeois étrenne les joies et les cocasseries de l’adultère. Mais en musique s’il vous plait ! Entre les déhanchés canailles des yéyés et les langoureuses danses nuptiales parodiant le glamour des années 50, les personnages se cherchent et se séduisent tout en visant la satisfaction de leur narcissisme. Un Feydeau cuisiné à la sauce sixities par Aline César qui garde l’oeil sur la recette d’origine : amants, maîtresses, maris et femmes vont et viennent, se croisent et évitent de justesse la castastrophe d’une confrontation. Les situations rocambolesques s’accumulent, l’amour est un joyeux ratage. Pas de doute, voilà du Feydeau optimisé par une mise en scène bien inspirée ! (...) Bien vue et bien menée, la transposition de la célèbre intrigue au début des années 60 offre un spectacle pétillant où se confondent, dans une joyeuse et harmonieuse cacophonie, l’empressement des personnages de Feyeau à s’initier aux plaisirs extra-conjugaux et cette volonté de liberté confinant à l’égocentrisme, revendiquée par la jeunesse des sixties (...). Léger, drôle, personnalisé par une véritable ambiance musicale et un ancrage significatif dans les années 60, voilà un classique revisité avec talent !
Le Journal du Théâtre / Agnès Jaulin / 24 mai 2005

Un spectacle vraiment « bat » ! Aline César a eu l’heureuse idée de transposer Feydeau au début des annes 1960. Nous sommes séduits et amusés par son choix de mise en scène entre cinéma et comédie musicale. (...) le décor kitsch ultra coloré, les costumes pop et la chorégraphie donnent une allure terrible à la comédie. Drôle et irrésistible, la troupe joue avec feu la folle course à l’adultère. Un spectacle vraiment «bat» ! Le Pariscope / Lise de Rocquigny / 8 juin 2005

Jeune et coloré La jeune troupe d’acteurs et la mise en scène colorée dépoussièrent la pièce. Une réussite. Témoignage chrétien / L.C. / 9 juin 2005

Beaucoup de peps La metteuse en scène a pris le parti de transposer l’action de la pièce au début des années 60 et d’illustrer les situations par des chorégraphies ainsi que de nombreux extraits de musiques de films ou de comédies musicales, ce qui donne un côté parodique franchement drôle et assez inattendu à certaines scènes (...). Le résultat a donc beaucoup de peps, les effets comiques du texte font mouche à tous les coups... Vraiment, j’ai eu l’impression de redécouvrir cette pièce de Feydeau. Cette transposition dans les sixties très colorées fait apparaître de façon évidente le côté atemporel des situations et des personnages. Radio Aligre / «Les Sincères» / Manuel Piola / 6 juin 2005

L’amour vache Très inventive, notamment pendant les changements de décor, sa mise en scène transporte tout ce petit monde jusque dans les années 60. Elle est plutôt vivante, drôle, fine et sensuelle. A Voir à Lire / Georges Ghika / 7 juin 2005

Quand Monsieur chasse, Madame butine ! Au Vingtième Théâtre, Monsieur chasse ! flirte avec la comédie musicale. Une adaptation de la pièce de Georges Feydeau haute en couleurs où le trio du mari, de la femme et de l’amant s’en donne à coeur joie. (...) Le décor « pop », chargé de couleurs vives, crée une atmosphère complètement fantasmagorique. L’ajout des séquences musicales et chorégraphiées, entre comédie musicale et cinéma, apportent une touche sensuelle et permet de donner corps à l’imaginaire sexuel de ce petit monde où chacun se fait son film (...) Le choix d’une mise résolument esthétique et visuelle où tout est ostentatoire permet non seulement d’illustrer cette prédominance de l’ego, mais aussi la part d’illusion et de factice inhérent à la séduction. Par ailleurs, elle confère à cette partie de chasse le caractère épique et décalé qui fait son charme... Marianne.fr / 17 juin 2005
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